Historique

Il y a 150 ans

Monsieur le Curé Modelonde (1797-1882) fut le premier curé de la Trinité. Rappelons qu’il y eut trois églises successives dans la paroisse : en 1850, 21, rue de Calais ; en 1852, 12, rue de Clichy et en 1867, l’église actuelle (inaugurée le 7 novembre)

En 1850, Monsieur le Curé appela sur la paroisse, les sœurs de l’Immaculée Conception, une branche de la congrégation de la Sainte-Famille de Bordeaux, fondée en 1820, qui oriente ses activités vers l’enseignement. L’école maternelle exista, semble-t-il, rue de Calais

Grâce à la générosité et aux capitaux apportés par Mr et Mme Bassery, l’école s’installe 20 rue Chaptal, puis une dizaine d’années après au 16 rue de Milan, à son emplacement actuel. Cette rue fut percée en 1831 sans autorisation, puis en 1835 le conseil Municipal régularisa son existence. C’est donc dans une rue « toute neuve » que les sœurs s’installèrent.

En 1903, lors des lois laïques, les religieuses reçoivent l’ordre de partir dans les quinze jours. Le nombre d’élèves externes ou demi-pensionnaires est alors d’environ 300. Devant l’attitude de la population du quartier et grâce à l’intervention du député Monsieur Paul Escudier, la menace d’expulsion n’est pas mise à exécution. La procédure ne sera définitivement abandonnée qu’après dix ans de tracasseries administratives. .

En 1914, seconde alerte.

Les décrets ordonnant la fermeture de l’école sont signés quelques jours avant la déclaration de la guerre. Les événements vont empêcher la mise à exécution des ordonnances, et les religieuses peuvent poursuivre leur enseignement auprès des jeunes filles.

Les années qui suivent vont voir les transformations de l’école : école maternelle, classes élémentaires, cours complémentaires, classes avec enseignement professionnel… les effectifs variant suivant les courbes démographiques du quartier. Le 1er mars 1966, les lois sur l’Enseignement Libre (dites lois Debré) vont permettre à l’école de bénéficier de l’aide de l’Etat par la signature d’un contrat simple. A cette époque, l’école compte trois classes enfantines (109 élèves) et huit classes élémentaires (243 élèves) soit 32 élèves de moyenne.

En 1969, l’école est réduite à sept classes élémentaires puis six en 1970. La mixité devient une nécessité et commence en 1973.

En 1974, la congrégation de la Sainte-Famille de Bordeaux est amenée à prendre la décision de se retirer de l’enseignement, faute de vocations en nombre suffisant. Cela faisait quelques années qu’un accord était passé avec les Dominicaines de la rue de Clichy (Saint-Louis ). Mais la solution n’est pas idéale et la direction de l’école est confiée à un laïc : Monsieur Allain. La dernière directrice religieuse, sœur Louise Schweitzer, laissera son poste de direction, désirant conserver son activité d’enseignante en classe de CP. Elle restera à ce poste jusqu’en 1978 alors que ses sœurs de communauté abandonnent définitivement le quartier en 1976, après plus d’un siècle de présence. Les locaux de la communauté (troisième étage) abritèrent l’Institut Libre de formation des professeurs d’Education Physique et Sportive (ILEPS) et, depuis 1994, la Fédération des Associations Culturelles Educatives et de Loisirs (FACEL).

Pendant l’été 1997, les locaux de l’école accueillirent des jeunes venus à l’occasion de J.M.J. En 1999, fut ouverte une nouvelle classe sous les combles : l’actuelle CM1/CM2. Durant l’été 2003, pour améliorer la sécurité et le confort des élèves, de gros travaux ont été réalisés : l’escalier métallique desservant l’immeuble sur rue et les aménagements des paliers.

Actuellement, l’école compte 270 élèves répartis dans dix classes : trois classes maternelles et sept classes élémentaires.

Une école aux murs historiques

En 1766 (Louis XV a alors 56 ans), l’un des fils du riche financier Boutin, fermier général, fait édifier plusieurs pavillons, -dont le principal au n°102 de la rue Saint-Lazare, un autre au n°27 de la rue de Clichy – qui sont placés dans un parc de huit hectares, avec des fausses ruines, des rochers et des boulingrins, et lui donne le nom de « Tivoli », en hommage aux jardins romains du même nom. Cet ensemble comprendrait, aujourd’hui, un rectangle délimité par les rues d’Amsterdam, Saint-Lazare, Clichy et dAthènes ; une des entrées se trouve entre les n° 76 et 78 de la rue Saint-Lazare. « La Folie Boutin », sous l’impulsion de son créateur Simon-Charles, Trésorier Général de la Marine, devient vite célèbre pour ses jardins magnifiques ornés de plantes rares et par ses divertissements. Dès 1771, tout Paris (ainsi que la cour de Louis XV) ne parle plus que de cette fabuleuse juxtaposition de jardins « anglais », « italiens » et « hollandais » agrémentés de jeux d’eau, ainsi qu’un jardin « utile » possédant ménagerie, vacherie, écuries, basse-cour, serres chaudes et froides, pépinière, verger… Pendant plus de vingt ans elle est librement ouverte, mais payante, aux parisiens les jeudis, dimanches et jours de fête.

Le 20 juin 1791, Marie-Antoinette s’y promène ostensiblement l’après-midi du jour où la famille royale s’enfuit des Tuileries. Puis la Terreur commence. Simon-Gabriel Boutin commet l’erreur de se rendre à Bath à l’automne 1793, pour une cure thermale. Il est désigné comme émigré et décapité, pour cause de richesse ostentatoire, le 4 Thermidor de l’An il (22 juillet 1794), cinq jours avant la chute de Robespierre. Il compta parmi les dernières victimes de la Terreur. En 1795, deux ans après la mort de Louis XVI, la Folie Boutin ouvre à nouveau et prend définitivement le nom de Tivoli.

Le Tivoli, c’est l’arrière-grand-père des parcs d’attractions : un vaste espace de huit hectares dans laquelle les forains ruinés par l’abolition des privilèges de la nuit du 4 août viennent se réfugier, appelés par Gérard Desrivières, député à la Convention, le nouveau locataire du lieu. Avec Claude Ruggieni, concepteur et fournisseur de feux d’artifice, il organise des fêtes insensées, accueille les Muscadins, les Incroyables et les Merveilleuses.

Les héritiers Boutin récupèrent les jardins de feu leur père en 1797. La succession de Simon-Charles Boutin ne se trouvera complètement liquidée qu’en…1817. Les temps changent, les goûts des Parisiens également et les Jardins de Tivoli perdent de leur attrait. En 1821, les héritiers Boutin et consorts cèdent la propriété à Monsieur Hagermann, banquier suédois, demeurant rue de Rivoli à Paris, moyen­nant la somme de 440 000 francs. Hagermann avait acquis La Malmaison auprès de la veuve du Prince Eugène de Beauhamais, fils de Joséphine. Avec son confrère Mignon, ils vont lotir ce qui deviendra de quartier de l’Europe.

Quatorze années plus tard, en 1835, Monsieur Hagermann revend « les deux constructions » à Monsieur Villebeyssex, entrepreneur de travaux publics. Les bâtiments portent bientôt les n° 10 et 10 bis de la rue de Milan. Mais les affaires de Monsieur Villebeyssex n’étaient pas prospères et celui-ci fait faillite en 1840. Ses biens sont vendus aux enchères par ses créanciers et les immeubles du 16 et du 18 rue de Milan sont acquis par messieurs de Lavenant, père (pour le n° 10 qui devient le 16) et fils (pour le n° 10 bis devenu le 18).

Le 21 juin 1853, le Général de Division Christophe Michel, Comte Roguet, marié en première noces à Madame Anne Suzanne Pauline de Ladoucette, acquiert « l’hôtel portant sur la rue de Milan le n°16 et la propriété de produit sise même rue au n°18 ». Cette acquisition se fait contre paiement d’une somme de 140 000 francs. Le franc étant toujours le Franc Germinal institué par le 1er Consul, la plus-value n’est pas négligeable … Après le décès de son épouse en 1856, le Général Roguet se remarie avec Madame Marie Lemanska, qui hérite du bien au décès du Comte en 1877. En 1879, Madame Lemanska, veuve du Général Comte, vend le n° 16 à la Société Civile La Providence, moyennant la somme de 280 000 francs.

La Société Civile La Providence a été constituée le 27 mars 1878 entre les personnes suivantes : Aime Allary, Marie Gellié, Félicité Rita Bornât, Marie Mouezi, Modestine Gabreaux, Joséphine Géllibert, Eugénie de Savignac, Marthe Gabrielle Bourdon, Marceline Jacob, Marie Françoise Meneu, Amecie Louise Des­champs, Jeanne Pompey et Louise Couteau. Qui sont ces dames ? Des suffragettes ? Un club féminin d’investissement ? L’acte de vente nous apprend qu’elles sont sans profession et pour la plupart domiciliées à Bordeaux. D’honnêtes mères de famille du Quai des Charbons ou de la Place des Quinconces ? En fait, elles sont sœurs, sœurs de la Sainte-Famille de Bordeaux et, depuis 1855, quelques-unes animent une petite école au 16 de la rue de Milan, hébergées par la Comtesse Roguet.

Les temps devenaient hostiles aux congrégations. La Société Civile La Providence cède, en 1881, son bien parisien à Mademoiselle Caroline Pauline Hyacinthe Cartuyvels. Sans doute est-ce un hasard, mais Mademoiselle Cartuyvels, sans profession, habite … Bordeaux. L’acquisition se fait au prix de 300 000 francs. Cinq ans plus tard, c’est au même prix que l’Abbé Lemaître rachète les bâtiments à la demoiselle Cartuyvels.

En 1895, le ciel politique français se couvre de lourds nuages. Emile Combes, pourtant docteur en théologie, entre dans le cabinet Léon Bourgeois comme ministre de l’Instruction Publique. On connaît la suite………

Une Société Anonyme Immobilière est créée la même année et acquiert, pour 340 000 francs « un hôtel situé à Paris, rue de Milan au № 16 un principal corps de bâtiment en façade sur la rue ainsi qu’un second et qu’un troisième bâtiments ». Cette société détiendra les lieux de 1895 à 1972, date de sa transformation en Association loi 1901, l’actuelle Association Milan 16. Mais l’histoire de la Société Anonyme Immobilière de la rue de Milan n°16 n’est pas sans trouble, ainsi que le relatent les procès-verbaux des assemblées générales. L’Administration des Domaines va contester la vente du bien à la Société Anonyme Immobilière. Un procès est intenté en 1913 qui ne trouvera son dénouement qu’en 1922. Il est vrai qu’entre temps plus de quatre années de conflit vont occuper les esprits. Un premier jugement tranche en faveur de Ja SAI. L’Administration fait appel et le 13 janvier 1922, la Cour d’Appel confirme le premier jugement. Il n’y aura pas de pourvoi en cassation. Mais qui occupe les bâtiments ? Quand elle prend possession des lieux, la Société Anonyme Immobilière confirme le bail concédé à Mmes Casse et Gagnier « pour 6, 12 ou 18 ans, à la volonté des preneurs à compter du 1er janvier 1893.» Au bout de 15 ans, en janvier 1908, les bâtiments sont donnés à bail à Madame la Marquise de Courcault. Le bail sera renouvelé jusqu’en 1931 date à laquelle la nouvelle locataire sera Mademoiselle Fabignon.

Dans leurs comptes-rendus, les administrateurs sont d’une totale discrétion sur la nature réelle des activités de leurs locataires. 1936 se passe apparemment sans problème. La seconde guerre mondiale arrive. En 1941, l’assemblée générale note une pénalité encourue en juillet 1940 pour un retard de paiement de l’annuité du Crédit Foncier. Même au cœur de la débâcle, un banquier reste un banquier. Le 26 décembre 1944, un bombardement sur la gare Saint-Lazare occasionne quelques dégâts aux bâtiments de l’école. Ces dommages seront partiellement remboursés par l’Etat… en 1950.

En 1972, profitant d’une disposition de la loi sur les société de 1966, les actionnaires de la Société Anonyme Immobilière décide la transformation de celle-ci an Association régie par la loi de 1901, et ceci sans contrepartie financière aucune. Exemple à méditer de générosité militante, qui laisse rêveur dans le contexte actuel.

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